Réflexion pour un renouveau de l’Etat Haïtien

Cherisier Lavoisier Jr.

Soumis à notre rédaction, ‘’Réflexion pour un renouveau de l’Etat haïtien,’’ ce texte de Cherisier Lavoisier Jr., interpelle l’Etat à s’acquitter efficacement de sa mission fondamentale, de protection, de défense, et de survie de son peuple. Se mettant au service de son peuple, l’Etat doit être l’expression de la souveraineté nationale. C’est le bien commun qui permet à chaque citoyen d’atteindre son excellence…

 Par Cherisier Lavoisier Jr.

 New-York, 20 septembre 2020– La note du Département D’Etat Américain en date du 17 Septembre soulève de plein fouet la problématique d’un Etat haïtien aujourd’hui à genou.

Nous nous sommes, pendant longtemps, écartés de notre vocation de défenseur de la liberté des peuples faibles contre les puissances belliqueuses sur la scène mondiale. Notre pays est aujourd’hui situé par la force des événements mondiaux et par son histoire à un carrefour difficile. On doit le reconnaître, notre dignité de peuple libre est aujourd’hui menacée parce qu’elle n’est pas établie sur un État avec un socle solide.

Dois-je rappeler ici que l’Etat est là pour servir les citoyens et que c’est à eux et à eux seuls que revient le droit de désigner leurs représentants qui auront à engager l’Etat à assumer ses responsabilités.

Considérant les changements multiformes et véloces que connaît le monde, son impact sur notre société : l’ouverture des frontières et en même temps, les indépendances nationalistes territoriales réclamées – la mondialisation de l’économie et en même temps les politiques unilatérales de contrôle qu’exercent les grandes puissances, sur la politique et la finance internationale -la montée du chômage tandis que des prises en charges en bénéfices sociaux sont exigées par les classes d’en-bas. L’exclusion sociale et l’immigration bannies etc… autant de faits saillants et complexes à prendre en compte. Les responsabilités de l’Etat doivent être réévaluées, et adaptées à nos propres circonstances avec un œil sur le monde pour assurer la survie de la nation.

La société haïtienne et l’environnement mondial ont évolués considérablement et l’Etat haïtien doit s’adapter de façon à améliorer sa capacité d’action, garantir la cohésion nationale et assurer la défense de ses propres intérêts nationaux et stratégiques.

Comme disait Hannah Arendt : ” La cité est fondamentalement périssable. Sa survie dépend de nous”

Et Paul Ricoeur lui, a voulu nous éclairer en ces propos :

” Le site de l’Etat n’est plus clair dans la conscience des citoyens”.

Puisque formé, initié à la vie politique et inculqué sur le sens du devoir et de l’Etat, j’ai tenu encore une fois à faire parler ma plume trop longtemps endormie car l’heure est venue pour Haïti de tracer son propre destin.

Notre pays s’est trouvé confronté pour l’immédiat à des problèmes majeurs dont les solutions ne sont pas encore pensées selon leur priorité et poids relatifs à notre devenir collectif.

Tous ces propos nous invitent à nous demander : ” Que doit faire L’État haïtien ? Et comment doit-il le faire ? Ces interrogations sont d’une importance particulière dans le contexte mondiale actuelle.

Notre avenir désormais dépend de la résolution de l’organisme qu’est l’État, de sa vigueur, de sa ténacité à faire respecter notre dignité.

Il est illusoire d’affirmer que l’Etat haïtien est en mesure maintenant de se doter des moyens nécessaires pour réaliser ses ambitions : Préserver l’indépendance nationale, assurer la défense de notre souveraineté nationale et garantir la protection de tous ses citoyens. Dépositaire de la souveraineté, instrument du pouvoir politique, porte-parole de l’intérêt général, l’Etat est investi de responsabilités fondamentales dont l’importante souveraineté nationale. Pourtant l’Etat haïtien est dépassé par les événements et il est de moins en moins capable de donner aux citoyens le sentiment d’assurer leur sécurité et protéger les intérêts stratégiques de la nation.

On le sait tous qu’il ne peut exister de gouvernement souverain s’il n’est d’assemblées souveraines et toutes les institutions étatiques doivent être en permanence au service de la nation, seule détentrice de la souveraineté. Mais voilà, l’échec de nos institutions est constaté à tous les niveaux et dans tous les domaines avec pour conséquence directe la fragilisation de la démocratie et l’éventuelle restauration d’une dictature.

Notre destin est menacé parce que nous avons cessé d’oser car la peur a envahi les esprits et le sens patriotique et le civisme ont quasiment disparu. La défaillance de nos institutions n’est plus à démontrer et l’abdication à notre fierté nationale est indéniable.

On est devenu un peuple de lâches et de résignés, le mensonge n’est plus écarté et on a peur de mesurer les dangers qui planent sur nos têtes. L’âme de la nation haïtienne est profondément endormie, elle est vidée de l’amour de la liberté, du sens de l’autorité et de celui de la justice.

C ‘est une vérité essentielle à notre existence de peuple libre : nul n’a le droit de le méconnaître. En ces temps marqués par le mépris et l’humiliation des Etats faibles sur la scène mondiale puisque la faiblesse ne faisant plus l’objet de bienveillance, notre arme de résistance est notre dignité.

Nous sommes tous conscients que l’Etat haïtien est loin de pouvoir prétendre à une quelconque égalité de puissance avec les grands pays du monde contemporain.

La note de l’ambassade américaine faisant des injonctions accompagnées de menaces aux citoyens d’un État souverain est un exemple flagrant de notre échec et doit interpeller chaque haïtien(ne) sur la nécessaire urgence de repenser les responsabilités de l’Etat haïtien de même que son organisation autour de sa capacité réelle à assurer sa mission de souveraineté et d’accomplir ses objectifs de sécurité nationale face aux menaces externes de toutes sortes.

Pour ce faire, il est impératif que chaque citoyen consente à s’engager dans le débat public sur la restauration de l’autorité de l’état.

Les circonstances du moment nous obligent en tant que citoyens (nes) à réfléchir pour mieux cerner les enjeux actuels, les attentes comme les obstacles au changement. Tous les grands domaines de responsabilité publique doivent faire l’objet de réflexion approfondie : la sécurité, la justice, la défense des haïtiens dans le monde, l’économie, l’éducation, la culture, le territoire national, la cohésion sociale. L’Etat doit mettre en place des structures chargées de prendre en main ses devoirs et obligations étatiques. Il s’agit de réformer en profondeur.

Et loin de moi la pensée de faire une apologie d’un quelconque nationalisme qui est ce sentiment excessif se manifestant en mode volonté supérieure ou mépris à l’égard d’autres peuples mais plutôt je fais une plaidoirie d’un vrai sentiment-juste et droit- par lequel, face à la division, la sécession, l’abandon, la résignation : une communauté affirme sa conviction de rester unie, solidaire et souveraine pour sauver son existence et protéger la liberté de ses citoyens.

C’est l’État dans son intégralité qui doit faire l’objet de réflexion dans l’esprit s’identifiant à notre histoire, à notre culture.

À noter que l’Etat est en effet cette organisation qu’une collectivité se donne pour assurer son existence et sa survie.

On est arrivé à un moment-clé de notre histoire nationale où l’Etat doit être repensé et construit suivant une nouvelle philosophie utile pour lui permettre d’améliorer l’efficacité de son système, la compétitivité sur la scène mondiale sans omettre de rendre au peuple haïtien sa richesse d’antan.

Oui le peuple haïtien attend beaucoup de son État et tient à ce qu’il intervienne, pour remplir correctement son devoir. Aujourd’hui l’Etat est comme absent, opaque, lointain et sourd au cri des haïtiens.

Cette réflexion sur les responsabilités de l’Etat en ces temps de crise où le discours de l’État n’arrive plus à faire écho dans l’esprit des Haïtiens, souhaite inviter l’Etat à développer un ensemble des principes, des valeurs, des règles de références dans lesquels les haïtiens se reconnaissent

L’Etat doit être à cet égard un producteur de cohésion entre tous les haïtiens. Ainsi il est impératif que nous apprenions, de notre passé commun, que nous nous souvenions de nos racines anciennes, que nous tirions de notre effort de solidarité, que nous ressentions ce qui nous unit…que nous prenions la mesure de notre objectif…que nous ayons une conception partagée de notre bien commun.

Avec ça, il nous faut travailler à atteindre cette dimension hautement spirituelle non encore mise à jour : unité spirituelle qui fait qu’un peuple traverse l’histoire la tête haute. Et c’est dans l’Etat qu’on doit la retrouver. Et l’enjeu aujourd’hui, c’est de retrouver les fondamentaux fonctionnels de cet organisme vital qu’est l’Etat, ceci pour faire face aux bouleversements qui ne manquent pas en ce monde, en notre monde.

 

Cherisier Lavoisier Jr.

(516) 406-4603

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