Haïti : Le ministre de la Justice ordonne le gel des avoirs des individus sanctionnés par l’ONU…

Patrick Pélissier , ministre de la justice...

PORT-AU-PRINCE, jeudi 15 mai 2025 – RHINEWS– Le Ministère de la Justice et de la Sécurité publique (MJSP) a ordonné au Commissaire du gouvernement près le tribunal de première instance de Port-au-Prince, Me Frantz Monclair, de prendre une série de mesures conservatoires immédiates contre des ressortissants haïtiens sanctionnés par les Nations Unies, dans une directive officielle datée du 12 mai 2025.

Dans cette correspondance, le ministre de la Justice Me Patrick Pélissier indique que ces actions s’inscrivent dans l’attente d’une coopération judiciaire internationale sollicitée depuis mars dernier auprès des ambassades des pays ayant pris des sanctions contre certains citoyens haïtiens. “Ces mesures visent à renforcer le traitement judiciaire de ces dossiers à l’échelle nationale.”

« Vous êtes instruit d’adopter les mesures suivantes : prendre les dispositions légales pour le gel immédiat de tous les comptes appartenant aux individus sanctionnés sous le régime des Nations Unies, ainsi que ceux de leurs complices », peut-on lire dans la directive adressée à Me Monclair.

Ce gel des avoirs est demandé conformément à la résolution 2653 du Conseil de sécurité de l’ONU, ainsi qu’au décret du 30 avril 2023, relatif à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive.

Le ministre enjoint également à ce que les institutions spécialisées de contrôle financiersoient mobilisées pour enquêter sur l’ensemble des activités financières des personnes visées. L’objectif est de dresser un portrait complet des circuits économiques impliqués dans le financement des groupes criminels.

Depuis l’adoption des premières sanctions internationales en 2022 et leur renforcement en 2023 et 2024, aucune mesure judiciaire concrète n’avait été prise sur le territoire haïtien. Cette directive du MJSP pourrait donc représenter un tournant, notamment dans un contexte de regain de violence et d’impunité généralisée.

« Nous attendons toujours les dossiers des ressortissants sanctionnés, transmis par les pays partenaires. Mais entre-temps, Haïti ne peut rester inerte », a commenté à RHINEWS une source proche du ministère.

Les mesures ordonnées devraient aussi impliquer la Banque de la République d’Haïti (BRH), l’UCREF, la DGI, ainsi que les principales banques commerciales opérant dans le pays. Celles-ci seront appelées à bloquer les avoirs identifiés et à collaborer aux enquêtes lancées par le parquet et les organes d’investigation financière.

Aucune liste de noms n’a été divulguée pour l’instant, mais la résolution 2653 vise notamment les individus suspectés de soutenir matériellement, financièrement ou politiquement les gangs armés opérant à Port-au-Prince dans l’Artibonite et le plateau central.

Le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté la résolution 2653 en octobre 2022, établissant un régime de sanctions ciblant les individus et entités soutenant les gangs armés en Haïti. Cette résolution permet le gel des avoirs, l’interdiction de voyager et l’embargo sur les armes à l’encontre des personnes identifiées. Bien que le nombre exact de personnes sanctionnées ne soit pas précisé, il est mentionné que des dizaines de ressortissants haïtiens ont été visés par ces mesures.

Le Département du Trésor des États-Unis, par le biais de l’Office of Foreign Assets Control (OFAC), a désigné plusieurs ressortissants haïtiens pour leur implication dans des activités de corruption et de soutien aux gangs armés. Parmi les personnes sanctionnées figurent des politiciens et des chefs de gangs. Les sanctions comprennent le gel des avoirs et des restrictions de voyage.

Le Canada a imposé des sanctions à plusieurs membres de l’élite politique et économique haïtienne, les accusant de soutenir les gangs armés et de se livrer à des actes de corruption. Depuis novembre 2022, le Canada a ajouté progressivement des individus à sa liste de sanctions, visant notamment des anciens responsables gouvernementaux et des chefs de gangs. Les sanctions incluent le gel des avoirs et des interdictions de voyager.   

Cependant, tous les individus sanctionnés ont toujours clamé leur innocence, niant toute implication dans le financement et le soutien aux organisations terroristes.