Risque de famine aggravée en Haïti: catastrophe humanitaire en perspective, selon l’économiste Fritz Jean!

Fritz Alphonse Jean, economiste,

Par Francklyn B Geffrard,

Port-au-Prince, 1e Juin 2020, (RHInews)- C’est une situation alarmante que décrit l’économiste Fritz Jean en ce qui a trait à la réalité socio-économique que vit le pays, déjà très dépendant sur le plan alimentaire.

Selon Fritz Jean, le risque pour que le pays bascule dans une situation de famine aggravée augmente considérablement ces derniers temps à cause de la crise sanitaire liée à la covid-19.

‘’Déjà, plus de quatre millions d’haïtiens vivent en situation d’insécurité alimentaire et près de trois millions d’autres nécessitent une intervention d’urgence, a-t-il fait remarquer.’’

De l’avis de Fritz Jean, la situation de famine et de misère que connait le pays pourrait se détériorer davantage puisqu’Haïti dépend beaucoup de l’importation. M. Jean souligne que les importations d’Haïti ont chuté ces derniers temps de 54% en raison de la crise sanitaire du coronavirus qui force les pays fournisseurs à diminuer considérablement leurs exportations pour faire face à ce qui pourrait se passer après la pandémie de la covid-19.

Haïti qui exporte trois (3) fois plus que ce qu’elle exporte devrait au moins profiter de la crise actuelle pour relancer le secteur agricole qui emploie près de soixante pourcent (60%) de la population, a fait remarquer Fritz Jean qui croit que la covid-19 offre une opportunité extraordinaire au pays pour s’en sortir.

L’ancien gouverneur de la Banque Centrale dit craindre un éclatement social au milieu de la crise sanitaire puisque l’Etat n’a pas les reins assez solides pour répondre aux besoins préliminaires des haïtiens en matière de santé, de nourriture et de sécurité. ‘’Si aucune mesure de redressement n’est prise, la situation actuelle pourrait entraîner le pays vers une catastrophe humanitaire, prévient l’économiste.’’

Il dit déplorer également que l’Etat soit l’otage de quelques familles qui contrôlent les organes fiscaux tels que la douane et la DGI (Direction Générale des Impôts). Pire encore, souligne Fritz Jean, l’Etat haïtien n’exerce véritablement aucun contrôle rigoureux sur sa frontière avec la République Dominicaine alors que la contrebande qui implique de hautes autorités publiques et des éléments du secteur des affaires, fait perdre au pays l’équivalent de quatre-cent-cinquante à cinq-cents millions de dollars américains par an.

Selon lui, l’Etat haïtien n’inscrit pas son action dans une dynamique d’innovation.  ‘’Le déficit budgétaire se creuse davantage, la gourde se déprécie alors que l’inflation grimpe dans un pays où l’investissement dans des secteurs productifs se fait de plus en plus rare, souligne l’économiste.’’

Haïti produisait au moins quatre-vingts pourcent (80%) de ses biens alimentaires jusqu’en 1986 avant l’ouverture du marché agricole imposée notamment par les Etats-Unis et les institutions financières internationales dont le FMI (Fonds Monétaire International) et la Banque Mondiale.

La production agricole haïtienne a donc chuté en dessous de cinquante pourcent (50%). Cela place le pays dans une très mauvaise position qui le rend incapable d’atteindre son autosuffisance alimentaire.

Haïti importe pour plus de cinq milliards de dollars américains annuellement contre environ un milliard d’exportation.