Des universitaires haïtiens proposent un retour à la gouvernance démocratique qui s’inspire de l’esprit de l’article 149 de la constitution

Claude Moise, historien, Sonet Saint-Louis, juriste et Bernard Gousse, juriste...

Port-au-Prince, samedi 7 juillet 2021- Bernard Gousse, Sonet Saint-Louis, Patrick Pierre-Louis et Claude Moïse, respectivement juristes et professeurs de droits constitutionnel pour les trois premiers et historien pour le dernier, estiment que les dispositions constitutionnelles en vigueur sont inapplicables à la situation née de la disparition de l’ancien président Jovenel Moïse.

Ils conviennent qu’aucune solution ne sera constitutionnelle. Toutefois, ils estiment qu’a défaut de la lettre de l’article 149 de la constitution, on peut se servir de l’esprit pour proposer une solution de sortie de crise.

Analysant l’esprit de l’article, ils relèvent que ‘’le constituant avait souhaité que ce soit l’ensemble de la représentation populaire qui désigne le président provisoire jusqu’aux prochaines élections.’’

Il s’agit donc de trouver un mécanisme qui permette de rassembler un ensemble de personnalités qui représentent la Nation dans sa diversité, soulignent-ils.

C’est en ce sens que ces universitaires proposent donc la constitution d’un organe (Conseil d’État, Conseil de la Transition) qui regrouperait les dix Sénateurs encore en fonction et les différents secteurs traditionnellement sollicités pour la mise en place des conseils électoraux provisoires, à raison de deux représentants par secteur.

Les secteurs concernés sont : la Conférence Episcopale d’Haïti, la Fédération Protestante, le secteur vaudouisant, la chambre commerce et d’industrie (CCIH), la Cour de Cassation ou la Fédération des Barreaux, le secteur des droits humains (POHDH), le secteur universitaire (CORPUHA) et secteur de la presse (Association des journalistes et association des médias).

‘‘Le Conseil d’État une fois formé désignerait le Président provisoire jusqu’aux prochaines élections, sur la base des critères énumérés à l’art. 135 de la Constitution,’’ selon les auteurs de cette proposition.

Le Président provisoire désignera un premier ministre après consultation avec l’organe de contrôle et en respectant les qualifications énumérées à l’art. 157 de la Constitution, précisent-ils, arguant que ‘‘le Premier Ministre et son gouvernement seront responsables devant l’organe de contrôle qui pourra leur infliger un vote de censure.’’

Plaidant pour l’octroi à l’organe de contrôle de toutes les compétences dont jouissent les Chambres, les universitaires proposent qu’aucun décret, ‘’aucun budget ne pourra être promulgué sans qu’il n’ait été approuvé par l’organe de contrôle dont les membres disposeront du pouvoir d’amendement.’’

En guise de feuille de route, ils proposent le rétablissement de la sécurité et le contrôle des armes à feu et le démantèlement des gangs armés.

Le rétablissement de la confiance dans le processus démocratique constitue une priorité pour le pouvoir de transition qui doit mettre en place un CEP crédible et inclusif.

Le nouveau pouvoir devra s’atteler à combattre l’impunité notamment en dynamisant ou relançant les enquêtes emblématiques (l’enquête sur l’assassinat du Bâtonnier Dorval, l’enquête sur l’assassinat du Président Moïse, les enquêtes sur les divers massacres, notamment ceux de La Saline, de Delmas 32, etc.) et les enquêtes sur la dilapidation des fonds de Petro Caribe entre autres.

L’accent sera mis aussi sur le respect de l’Etat de droit en rapportant les décrets pris par Jovenel Moïse notamment ceux concernant le Code Pénal, la création de l’ANI et sur la passation des marchés.

La proposition prévoit le rétablissement du pouvoir judiciaire dans ses droits le CSPJ et combler la Cour de Cassation. Ils suggèrent que soient rapportés les arrêtés mettant à la retraite certains juges de ladite Cour au mépris du principe d’inamovibilité.

Ils proposent l’initiation du processus pour la mise sur pied d’une Assemblée Constituante dans le respect des normes démocratiques en vue de l’adoption d’une nouvelle constitution.

Quant aux partis politiques, ils préconisent que ceux-ci s’engagent dans la conclusion de l’accord politique (classe politique et secteurs organisés de la société civile) devant déboucher, si leur proposition est acceptée, sur la désignation du Président provisoire et la constitution du gouvernement. Ils demeureront les vigies exigeantes de ce gouvernement.

Bernard Gousse, juriste, doyen de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l’Université Quisqueya, Titulaire de la Chaire Louis-Joseph-Janvier sur le Constitutionnalisme de la même Université ;  Claude Moïse, historien, spécialiste de l’histoire constitutionnelle haïtienne, membre du Conseil Scientifique de la Chaire Louis-Joseph-Janvier sur le Constitutionnalisme, Patrick Pierre-Louis, juriste, professeur de droit constitutionnel et de philosophie politique à l’Université d’État d’Haïti, membre du Conseil Scientifique de la Chaire Louis-Joseph-Janvier sur le Constitutionnalisme et Sonet Saint-Louis, juriste, professeur de droit constitutionnel à l’Université d’État d’Haïti.

Ils ont produit cette réflexion a la demande de l’université Quisqueya.

 

Gouvernance post-Moïse-Avis universitaires-04aout2021