PORT-AU-PRINCE, 1er juin 2025 (RHINEWS) –Dans un entretien au Réseau Haïtien de l’Infirmation (RHINEWS), Pierre Espérance, directeur exécutif du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH), a exprimé un soutien sans réserve au contrat passé entre l’État haïtien et une entreprise américaine privée de sécurité dans le but de neutraliser les groupes armés terroristes qui contrôlent plusieurs zones du pays. Il qualifie cette coopération d’« indispensable », tout en insistant sur la nécessité de transparence et de professionnalisme dans les opérations en cours.
« Toute action visant à neutraliser ou à faciliter le jugement des terroristes et de leurs complices, peu importe le secteur auquel ils appartient, nous la soutinsse et encourageons les autorités à profiter de la présence de la firme américaine pour renforcer la professionnalisation des forces nationales de sécurité», a-t-il déclaré. « Mais en même temps, nous devons faire tout notre possible pour protéger la population, pour éviter les dommages collatéraux. »
Ce soutien s’inscrit, dit-il, dans une analyse implacable de la montée en puissance des gangs armés depuis les deux mandats du régime PHTK, notamment sous Jovenel Moïse. Pierre Espérance accuse le pouvoir de l’époque d’avoir détourné les institutions étatiques de leur rôle fondamental
Le directeur exécutif du RNDDH remonte jusqu’aux premiers massacres répertoriés, notamment à La Saline, Cité Soleil et Bel-Air, pour illustrer ce qu’il appelle « une stratégie planifiée de terreur et de destruction ». Pour lui, c’est à ce moment-là que les gangs se sont fédérés, organisés, et ont étendu leur emprise sur la region métropolitaine avec de toutes sortes de complicités nationales et internationales: « Ils vivaient ensemble, ils se sont organisés. Ils ont écrasé le pays pour pouvoir terroriser la population. »
Dans ce contexte, Pierre Espérance estime que le recours à une firme étrangère peut aider à rétablir l’ordre, mais à certaines conditions : « La réputation de ce groupe, vous en avez parlé, que les autorités haïtiennes ont engagé, c’est un groupe qui n’a pas une bonne réputation dans les pays où il est déjà intervenu. Et c’est pourquoi nous disons que nous exigeons la transparence. Nous voulons savoir ce qu’il y a dans le contrat, notamment sur les questions d’immunité. »
Selon ses informations, les membres de l’entreprise de sécurité seraient déjà déployés sur le terrain. Il appelle à une gestion rigoureuse et ciblée des opérations afin de minimiser les risques pour les civils : « Il faut éviter les victimes, les dommages collatéraux… dans l’église, dans le marché public… »
Pierre Espérance reconnaît les limites actuelles de l’État haïtien à assurer sa propre sécurité, notamment en matière de formation et d’équipement. Mais il insiste : avec les ressources appropriées, le pays pourra se libérer de l’étreinte des gangs : « Les bandits ne sont pas formés. Si nous avons l’équipement, le matériel, les ressources appropriées, nous pourrons les mobiliser dans la question sécuritaire. »
Interrogé sur les chefs de gangs et leurs soutiens politiques, Pierre Espérance va plus loin : « N’importe quel chef de gang qui se présente au RNDDH, nous ferons tous les arrangements pour que la police vienne, pour le neutraliser, pour le mettre en prison. » Il cite sans détour plusieurs personnalités politiques et administratives qu’il juge complices : « Jean Ruffel, Profane Victor, Magalie Habitant, directrice du CIS… qu’ils soient arrêtés. Qu’on les arrête. »
À ses yeux, les véritables racines de l’insécurité ne se trouvent pas uniquement dans les quartiers contrôlés par les groupes armés, mais dans les institutions elles-mêmes. « Le problème est un infini. C’est un problème de banalisation. C’est un problème de gangstérisation », affirme-t-il. Et de dénoncer le rôle de la justice dans le maintien de l’impunité : « La justice haïtienne joue un rôle non négligeable dans ce climat de corruption. […] Où qu’ils aillent, ils ont un juge pour les couvrir. »
Il critique vertement les autorités du Conseil présidentiel de transition (CPT), dénonçant leur inaction et leur inefficacité depuis leur installation.
« Ce n’est pas le pays qui peut nous changer, c’est nous qui pouvons changer le pays. » Il plaide pour un changement de culture politique, pour des institutions crédibles et des dirigeants honnêtes. « Peu importe où vous les mettez, si ce sont des gens malhonnêtes, vous aurez le même résultat. »
Face à à une machine de mort bien installée, seule une réponse coordonnée, légale, armée et juste — incluant la participation internationale sous supervision haïtienne — pourra rétablir la paix. Et pour cela, « la prison ou la mort » reste, selon lui, la seule issue pour les chefs de terroristes qui continuent de semer la terreur sur le territoire national.