PORT-AU-PRINCE, 13 juin 2025 (RHINEWS) –La Centrale Unitaire des Travailleurs etTravailleuses des Secteurs Public et Privé d’Haïti (CUTRASEPH) a adressé une lettre ouverte au président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva, l’exhortant à inscrire dans la résolution finale du sommet deux engagements majeurs : le retrait du Brésil du Core Group et la reconnaissance d’un devoir de réparation pour les victimes haïtiennes du choléra introduit par la MINUSTAH.
Dans ce document transmis depuis Port-au-Prince, le Directoire de la CUTRASEPH salue d’abord le parcours syndical de Lula sous la dictature militaire ainsi que ses récentes prises de position sur la crise haïtienne, notamment son discours à Paris dénonçant l’ingérence historique des États-Unis dans les affaires haïtiennes. Mais les syndicalistes regrettent que « le Brésil s’associe toujours au Core Group, un cartel diplomatique » accusé d’imposer à Haïti une « dictature internationale » au détriment du droit à l’autodétermination du peuple haïtien.
« Il est regrettable qu’en 2025, le Brésil demeure associé au Core Group, alors même que de nombreuses voix en Amérique latine et dans la Caraïbe appellent à son retrait », souligne la lettre, citant notamment une correspondance envoyée le 24 mars 2024 depuis Saint-Domingue par un collectif d’organisations dominicaines, brésiliennes, péruviennes et boliviennes. Ces dernières dénonçaient l’empreinte néocoloniale du Core Group et demandaient « le respect des droits humains et de l’autodétermination du peuple haïtien ». La lettre rappelle également une missive remise en janvier 2023 à Lula par le prix Nobel de la paix Adolfo Pérez Esquivel et par Nora Cortiñas, figure emblématique des Mères de la place de Mai en Argentine, lors du VIIe Sommet de la CELAC. Ces deux personnalités appelaient le Brésil à rejeter toute intervention militaire, à quitter le Core Group, à demander la fermeture du BINUH, et à œuvrer pour la justice.
« Refuser la voie du silence et de l’indifférence serait un geste fort de l’État brésilien en faveur du droit international », estime le Directoire de la CUTRASEPH, qui en appelle à l’exemplarité du Brésil vis-à-vis de sa jeunesse et des étudiants en diplomatie. L’organisation syndicale établit par ailleurs un parallèle entre les silences brésilien et haïtien, en critiquant l’inaction des autorités de transition haïtiennes – Conseil Présidentiel et Primature – face à « une crise éducative aiguë affectant élèves et enseignants ». Elle leur reproche d’avoir eux aussi opté pour « la voie du silence et de l’indifférence », en dépit des droits fondamentaux garantis par la Constitution haïtienne et les conventions internationales ratifiées.
Dans un ton plus grave, la CUTRASEPH rappelle le lourd tribut payé par le peuple haïtien au passage de la MINUSTAH, la mission onusienne de stabilisation en Haïti dirigée militairement par le Brésil de 2004 à 2017. « Au lieu de stabiliser, la MINUSTAH a déstabilisé des dizaines de milliers de familles », accuse la lettre, évoquant « trente mille morts haïtiens du choléra », une épidémie introduite par les casques bleus selon de nombreux rapports d’experts. « Le peuple haïtien ne mérite-t-il pas réparation ? », questionne la centrale.
Dans sa conclusion, la CUTRASEPH presse le président Lula d’agir sans détour en inscrivant deux points clés dans la résolution finale du Sommet Caraïbe-Brésil : le retrait officiel du Brésil du Core Group, et un engagement concret en faveur de réparations aux victimes haïtiennes du choléra. « L’image de notre région en sortira rehaussée quand les règles du droit seront observées de part et d’autre dans le respect des peuples », affirme la centrale.