MIAMI, vendredi 4 avril 2025– En Haïti, « nous avons des gangs en costume et des gangs en sandales » : la militante pro-démocratie Monique Clesca
Monique Clesca est une autrice, ancienne fonctionnaire des Nations Unies et militante pro-démocratie bien connue en Haïti. Dans une interview accordée à FRANCE 24, elle déclare que « la vie quotidienne est infernale » et compare la capitale Port-au-Prince à « une prison à ciel ouvert ». Elle critique la force internationale soutenue par l’ONU ainsi que le Conseil présidentiel de transition, estimant qu’il ne sera pas capable d’organiser des élections d’ici la date limite de février 2026, fixée par la communauté internationale.
Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a récemment averti que Haïti avait atteint « un nouveau point de crise ». Plus de 4 000 personnes ont été tuées entre juillet 2024 et février 2025. Des gangs lourdement armés contrôlent des zones au-delà de Port-au-Prince, la situation humanitaire se dégrade et l’instabilité institutionnelle est extrême.
Monique Clesca affirme qu’il était « déjà absurde de penser » qu’une force internationale mandatée par l’ONU, principalement dirigée par le Kenya, pourrait contenir la violence croissante en Haïti. Pour elle, seuls les Haïtiens peuvent véritablement résoudre cette crise.
Elle explique : « C’est le signe d’une mauvaise gouvernance que d’avoir accepté cette force internationale. Ce que nous aurions dû faire, c’est former davantage de policiers haïtiens, renforcer l’armée, solidifier la population et fournir des services. Au lieu de cela, beaucoup d’énergie a été gaspillée à espérer qu’une force étrangère puisse tout régler. Elle est arrivée, et beaucoup d’Haïtiens disent qu’ils se comportent comme des touristes. Certains ont peut-être peur d’affronter les gangs, car après tout, ce n’est pas leur guerre. »
Elle critique également le Conseil présidentiel de transition haïtien, affirmant qu’il « n’a rien fait pour la population ». L’idée de tenir des élections en février 2026 lui semble irréaliste. « Comment pouvez-vous parler d’élections dans neuf mois alors que vous ne pouvez même pas aller au supermarché ? », dénonce-t-elle.
Engagée dans plusieurs ONG, Monique Clesca milite aussi pour que la France reconnaisse sa dette historique envers Haïti. Alors que l’on approche du 200e anniversaire de l’indemnité que Haïti a été contrainte de verser au roi Charles X après son indépendance, elle appelle le président Emmanuel Macron à reconnaître que « c’était une erreur ».
Elle propose la création d’une commission internationale, composée d’Haïtiens et de Français, pour examiner la situation et évaluer les réparations possibles.
« Emmanuel Macron peut entrer dans l’Histoire de la bonne manière en reconnaissant qu’il s’agit d’une injustice historique, et en agissant en conséquence », conclut-elle.
Cet article a été publié initialement en anglais sur: https://www.france24.com/en/tv-shows/t%C3%AAte-%C3%A0-t%C3%AAte/20250403-in-haiti-we-have-gangs-in-suits-and-gangs-in-sandals-pro-democracy-activist-clesca