Déportations massives : vague nationale de manifestations et tensions croissantes aux États-Unis…

WASHINGTON, mercredi 11 juin 2025 (RHINEWS)Une série de manifestations d’envergure secoue les grandes villes américaines depuis le week-end dernier, alors que la vague de déportations lancée par l’administration Trump provoque une onde de choc sans précédent. À Los Angeles, New York, Chicago, Boston et au-delà, des milliers de citoyens sont descendus dans les rues pour dénoncer une politique migratoire jugée brutale, arbitraire et contraire aux principes fondamentaux des droits humains.

À Los Angeles, devenue l’épicentre de la contestation, la tension a atteint son paroxysme dans la nuit du mardi 10 juin. La Garde nationale et près de 700 Marines ont été déployés pour renforcer les forces de l’ordre après l’arrestation de plus de 330 personnes, majoritairement des travailleurs sans antécédents criminels, dans le cadre de rafles ciblées menées par l’agence fédérale ICE.

« Nous n’avons jamais vu une telle militarisation d’une ville américaine depuis les émeutes de 1992 », a réagi la maire de Los Angeles, Karen Bass, qui a imposé un couvre-feu de 20 h à 6 h et décrété l’état d’urgence. « Cette décision est douloureuse mais nécessaire pour éviter un bain de sang », a-t-elle déclaré mardi soir.

Le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a vivement critiqué l’intervention fédérale : « Ce déploiement de la Garde nationale sur notre sol, sans concertation avec l’État, constitue une violation flagrante de notre souveraineté. Nous engageons immédiatement une action en justice contre l’administration fédérale. »

À New York, plus de 80 personnes ont été interpellées lors d’un rassemblement à Foley Square, où les slogans « No hate, no fear, immigrants are welcome here » ont résonné toute la soirée. Des élus démocrates locaux, dont Alexandria Ocasio-Cortez et Jamaal Bowman, ont rejoint les manifestants. « Ce que nous vivons est une politique d’épuration ethnique à peine voilée », a affirmé la députée Ocasio-Cortez.

À Chicago, Denver, Seattle et Boston, les scènes se répètent : cortèges massifs, affrontements avec la police, usage de gaz lacrymogènes, barricades, et interpellations. « Nous refusons de rester silencieux pendant que nos voisins sont arrachés à leur famille », a lancé un manifestant à Boston, enseignant dans une école primaire, dont plusieurs élèves sont concernés par les arrestations récentes.

Les protestataires dénoncent une campagne de déportation ciblée contre les communautés latino-américaines, haïtiennes et africaines. Selon des ONG comme l’ACLU et Human Rights Watch, les arrestations récentes concernent en majorité des immigrants sans casier judiciaire, travaillant légalement ou en attente de régularisation. « Il ne s’agit pas de criminels, mais de pères de famille, d’étudiants, de travailleurs essentiels », dénonce Anthony Romero, directeur exécutif de l’ACLU. « C’est une rafle politique qui rappelle les pages sombres de l’histoire américaine. »

Du côté fédéral, la secrétaire à la Sécurité intérieure, Kristi Noem, défend la politique de l’administration : « Nous restaurons l’État de droit. Ces opérations visent ceux qui ont ignoré les décisions de justice d’expulsion. » Elle a toutefois reconnu des « tensions regrettables » sur le terrain, et promis « une évaluation de certaines pratiques en cours ».

La Maison-Blanche, par la voix de Donald Trump, reste inflexible. Lors d’un discours au Texas mardi, l’ex-président et actuel candidat a martelé : « L’Amérique aux Américains. Les jours de laxisme sont terminés. Nous allons rétablir la sécurité, quartier par quartier, État par État. »

Face à cette radicalisation, plusieurs États démocrates, dont la Californie, le Massachusetts et l’État de Washington, ont annoncé des recours juridiques pour contester la légalité des opérations et du déploiement militaire. La présidente du Sénat californien, Toni Atkins, a déclaré : « Ce n’est pas ainsi que l’on gouverne. Ce que nous voyons est une dérive autoritaire. »

L’inquiétude grandit aussi dans les milieux religieux et universitaires. L’archevêque de Los Angeles, José Gomez, a dénoncé dans une lettre publique « une terreur infligée à nos communautés vulnérables », tandis que plusieurs universités ont ouvert des centres de soutien psychologique et juridique pour leurs étudiants sans papiers.

Pour l’heure, le mouvement semble s’intensifier. De nouvelles marches sont prévues jeudi à San Francisco, Austin, Philadelphie et Miami. Les appels à la grève générale se multiplient, notamment dans les secteurs du bâtiment, de la restauration et du nettoyage.

Alors que l’été électoral s’annonce tendu, la question migratoire s’impose déjà comme un des fronts les plus polarisants. Mais au‑delà des lignes partisanes, ce sont les fondements mêmes de la société américaine qui semblent mis à l’épreuve.