PORT-AU-PRINCE, lundi 2 juin 2025 (RHINEWS) –– Quatre ans après le massacre de Martissant survenu le 1er juin 2021, le Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme (CARDH) tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme face à l’impunité persistante entourant cette tragédie, dénonçant l’inaction des autorités judiciaires haïtiennes et la passivité de la communauté internationale.
Dans un communiqué publié ce dimanche, l’organisme de défense des droits humains qualifie de « crime contre l’humanité » les événements sanglants qui ont coûté la vie à plusieurs dizaines de personnes et provoqué le déplacement forcé de plus de 300 000 habitants. « Le massacre de Martissant constitue un exemple typique de nettoyage ethnique », estime le CARDH, soulignant que des quartiers entiers ont été vidés de leur population sous la menace des gangs armés opérant dans la zone, notamment les groupes “Ti Lapli” et “Krisla”.
Le 1er juin 2021, à l’intersection de Martissant, des civils ont été la cible d’une attaque coordonnée entre ces deux groupes criminels rivaux, déclenchant une vague de violences ayant rapidement transformé la zone en un champ de bataille incontrôlé. Selon le CARDH, cette opération s’est déroulée sous le regard complice des autorités étatiques, alors que plusieurs postes de police et institutions publiques étaient évacués quelques jours avant l’attaque. « Les autorités avaient été informées et ont choisi de ne pas intervenir », insiste l’organisation.
Le CARDH déplore qu’aucune enquête sérieuse n’ait été ouverte, qu’aucun auteur présumé n’ait été poursuivi et que la justice haïtienne demeure totalement absente dans ce dossier. « Depuis quatre ans, aucun juge d’instruction n’a été désigné pour enquêter sur ce massacre. L’État haïtien est coupable de non-assistance à population en danger », déclare le document.
Par ailleurs, le centre critique vertement la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) conduite par le Kenya, qui selon lui n’a toujours pas établi de feuille de route claire, à la veille de son déploiement effectif. « Alors que des contingents étrangers s’apprêtent à intervenir sur le terrain, ni le gouvernement haïtien ni les partenaires internationaux ne semblent préoccupés par la question de la justice. L’impunité ne peut pas servir de base à une paix durable », prévient le CARDH.
L’organisation demande en urgence la mise en place d’un tribunal spécial ou d’un dispositif judiciaire ad hoc pour poursuivre les auteurs et complices du massacre. Elle appelle aussi à une enquête indépendante, sous l’égide des Nations Unies, afin de documenter les crimes commis dans la zone de Martissant entre juin 2021 et juin 2023.
Enfin, le CARDH exhorte le Conseil présidentiel de transition et le gouvernement de Garry Conille à inscrire la lutte contre l’impunité au cœur de leur programme de refondation de l’État. « Il ne peut y avoir de transition crédible sans justice pour les victimes de Martissant et pour toutes les victimes des massacres perpétrés depuis 2018 », conclut le communiqué.