Haïti – Le système Dévallon : quand la Caisse d’Assistance Sociale devient le bras financier de “Viv Ansanm”…

Devallon Elionor, directeur de la Caisse d’Assistance Sociale (CAS)...

PORT-AU-PRINCE, dimanche 13 avril 2025, (RHINEWS) – Les révélations que la rédaction de RHINEWS a pu obtenir sur Elionor Devallon dressent le portrait glaçant d’un haut fonctionnaire devenu un pivot essentiel du système de terreur orchestré par l’organisation terroriste “Viv Ansanm”. Directeur général de la Caisse d’Assistance Sociale (CAS) depuis août 2024, Devallon aurait mis l’institution publique au service des gangs, orchestrant un réseau de financement, de logistique, de couverture policière et de redistribution de fonds étatiques, au profit des chefs criminels les plus redoutés du pays.

Selon les informations extraites de plusieurs téléphones et échanges WhatsApp, Elionor Devallon entretenait des liens constants et directs avec Magalie Habitant, Prophane Victor, mais aussi avec Jimmy Chérizier alias Barbecue, Renel Destina alias Ti Lapli, Chrisla, Dwòl, Ezéchiel, Kempès Sanon, et Chalè, tous membres ou affiliés à la coalition terroriste Viv Ansanm. Dans son téléphone, Ti Lapli figurait sous le pseudonyme de « KOLO N » .

Une série de transferts financiers illégaux a été confirmée. L’un d’eux, central, porte sur 350,000 gourdes que Devallon aurait remis sur demande de Magalie Habitant pour le compte de Jimmy “Barbecue” Cherizier, chef de Viv Ansanm. Dans un message WhatsApp, Habitant déclare :

« Celelou ap vin pran kòb la nan men DG a pote pou ou. »

Interrogé, Devallon a reconnu ce transfert, mais a tenté de minimiser en disant qu’il avait accepté de remettre seulement 200,000 gourdes, prétendument empruntées à un ami .

Cependant, les échanges indiquent que ces sommes venaient directement des fonds de la CAS, contournant toute procédure administrative. Magalie Habitant agissait comme courroie de transmission. Devallon, en lien avec ses collaborateurs Jean Junior César (directeur adjoint) et Wilinsky Dieujuste (comptable), auraient exploité la structure de la CAS pour extraire et rediriger l’argent public .

Son répertoire téléphonique contenait également des contacts directs avec des membres armés, et l’analyse de ses communications révèle une coordination active autour de livraisons de fonds et de matériel, notamment via Celelou et Tipouchon, deux lieutenants utilisés comme relais logistiques.

Le réseau de Devallon s’étendait jusqu’à la couverture sécuritaire armée : à son arrestation, il était escorté par deux policiers affectés à sa personne depuis plus de six mois — Pierre Paul Balan et Peterson Augustin — qui, loin de leurs fonctions officielles, le protégeaient au quotidien. Lors de cette opération, les policiers transportaient des armes de guerre, dont un fusil d’assaut CORE 15 et un pistolet Taurus  .

Mais le système Devallon ne se limitait pas au soutien direct aux gangs. Un message texte adressé au PDG d’une station de radio très populaire de la capitale, révèle qu’il a imprimé un chèque de 4 millions de gourdes au nom de ladite station, sans précision sur les motifs ou les prestations associées. Il aurait reconnu avoir effectué ce type de transactions pour d’autres médias, dint une agence en ligne également bien connu sur l’échiquier médiatique en Haïti.

La perquisition à son domicile a permis de retrouver plusieurs talons de chèques en son nom, avec des montants dépassant régulièrement 50,000 gourdes, allant jusqu’à 360,000 gourdes sur un seul document .

Elionor Devallon a été formellement dénoncé par Magalie Habitant comme un « commanditaire de certains membres de la coalition Viv Ansanm », tout en confirmant l’usage de son chauffeur, Lenès Jean Philippe, pour des livraisons de fonds .

Loin d’être un cas isolé, Devallon opérait dans une chaîne étroite avec Prophane Victor, qui a lui-même utilisé sa position et ses proches (Ghandi Jensen Victor, Claudel Victor, Eder Victor) pour faciliter des flux financiers et des mouvements logistiques entre Savien, Croix-des-Bouquets, Solino et Canaan .

Devallon aurait détourné sa fonction à la CAS pour ériger une véritable infrastructure de soutien étatique au crime organisé, avec des ramifications dans les médias, la police, les circuits politiques et financiers. Son cas symbolise la manière dont les institutions haïtiennes ont été infiltrées jusqu’au sommet par les forces du chaos.

Chronologie – Le système Devallon

Août 2024

• Elionor Devallon est nommé directeur général de la Caisse d’Assistance Sociale (CAS). Très vite, il y place ses proches et débute une série de détournements à des fins non officielles.

Octobre – Novembre 2024

• Des fonds sont retirés des comptes de la CAS pour des distributions en liquide dans les quartiers de Carrefour, Croix-des-Bouquets et Martissant.

• Devallon active un réseau de relais dont Celelou, Tipouchon, Wilinsky Dieujuste (comptable), et Jean Junior César (DG adjoint).

Décembre 2024

• Premier transfert de 350,000 gourdes ordonné par Magalie Habitant pour Jimmy Chérizier alias Barbecue. L’argent est physiquement remis via Celelou, selon un échange WhatsApp :

« Celelou ap vin pran kòb la nan men DG a pote pou ou »

• Devallon reconnaîtra plus tard avoir donné 200,000 gourdes, prétendant que la somme venait d’un ami.

5 janvier 2025

• Devallon échange avec Magalie Habitant sur un second décaissement destiné à l’achat de munitions, 20 caisses à 3,500 USD, soit 70,000 dollars. Magalie l’exhorte :

« Kòm se batay nap batay, fòk nou jwenn 20 kès bal ».

9-10 janvier 2025

• Des policiers affectés à la protection de Devallon, Pierre Paul Balan et Peterson Augustin, sont formellement identifiés. Ils sont détachés depuis 6 mois auprès de lui.

• Ces policiers sont arrêtés à Turgeau avec Devallon dans un véhicule officiel. Deux armes de guerre sont retrouvées à bord : un fusil CORE 15 et un pistolet Taurus.

12 janvier 2025

• Des informations téléphoniques révèlent qu’Elionor Devallon est en contact direct avec plusieurs chefs de gangs, dont Ti Lapli, listé dans son répertoire sous le nom de « KOLO N ».

13 janvier 2025

• Lors de son interrogatoire, Devallon reconnaît avoir signé plusieurs chèquesde la CAS sans justification. Il mentionne notamment un chèque de 4 millions de gourdes à la Radio Télévision Caraïbes, et déclare avoir financé d’autres médias sans citer lesquels.

15 janvier 2025

• Des documents saisis à la CAS et à son domicile confirment des retraits fréquents supérieurs à 50,000 gourdes, avec des pointes à 360,000 gourdes.

18 janvier 2025

• Magalie Habitant désigne Devallon comme « un commanditaire direct » de Viv Ansanm. Elle reconnaît qu’il a financé plusieurs opérations, en particulier à Canaan et à Solino.

Fin janvier 2025

• Des connexions téléphoniques et financières sont établies entre Devallon, Prophane Victor et les gangs de Barbecue, Izo, Chen Mechan, Jeff Gwo Lwa et Lanmò San Jou.