La police n’a toujours pas récupéré les corps des policiers tués lors de l’opération de Village de Dieu : Léon Charles doit des explications au pays !

Francklyn B Geffrard, Redacteur

Editorial

Par Francklyn B Geffrard,

Port-au-Prince, 26 mars 2021- Deux semaines se sont déjà écoulées depuis cette opération policière ordonnée par Léon Charles qui a tourné au drame à Village de Dieu.

L’opération visait à déloger des bandits regroupés au sein du gang ‘’5 Secondes’’ emmené par les nommés ‘’Izo et Manno,’’ deux individus réputés dangereux avec lesquels, Joseph Jouthe, premier ministre de facto a l’habitude de parler au téléphone.

Cette opération, la neuvième conduite sous le commandement de Léon Charles depuis qu’il est revenu à la tête de la police nationale, s’est soldée par un échec.

Le 12 mars 2021 la police a connu un vendredi noir. Pas moins de quatre (4) policiers, selon les chiffres officiels, ont péri dans cette opération. Les victimes sont Stanley Eugène, Ariel Poulard, Georges Renoit, Georges Vivender Alexis, Wislet Désilus. Un autre agent de la SWAT Team, Lucdor Pierre est toujours porté disparu. Tout comme les autres, ses parents sont inconsolables et ne savent plus à quel saint se vouer.

Pris au piège, les policiers victimes ont passé plusieurs heures à demander des renforts. Cependant, aucune tentative pour les aider n’a été faite, a-t-on appris.  Quatre (4) des douze (12) policiers ont été abattus sauvagement après avoir été torturés, humiliés par les bandits qui ont mutilé leurs cadavres après les avoir traînés dans la boue, selon des vidéos de propagande diffusées sur les réseaux sociaux.

Huit (8) autres, selon la direction générale de la police nationale ont été blessés et admis d’urgence à l’hôpital pour être soignés.

Le pays a découvert ces scènes d’horreur diffusées en boucles en temps réel, notamment sur Facebook et WhatsApp. Cependant, le commandant en chef a.i de la PNH, Léon Charles et le chef du conseil supérieur de la police nationale (CSPN) Joseph Jouthe ont attendu plus de vingt-quatre (24) heures avent de visiter les policiers blessés et de prendre la parole sur le drame.

A date, les plus hautes autorités de la chaine de commandement de la police nationale impliquées dans la planification de cette opération suicide qui, apparemment, ne pouvait qu’échouer, n’ont toujours fourni aucune explication au pays sur ce qui s’est réellement passé le vendredi 12 mars 2021 a Village de Dieu, dans le fief de Izo et Manno, membres de la fédération des gangs dénommé ‘’G-9 an fanmi e Alye,’’ piloté par l’homme fort de Delmas 6, Jimmy Cherizier alias Barbecue, réputé proche du pouvoir en place.

Comme s’il était le seul à avoir été responsable de l’échec de l’opération, l’inspecteur général de la police nationale, Carl-Henry Boucher, également responsable du service de renseignement de l’institution policière, a été auditionné à l’inspection générale de la police d’Haïti (IGPNH) et enfermé dans un cachot, dans des conditions infrahumaines, selon ce qu’ont dénoncé ses proches.

Ceux qui composent le CSPN sont toujours en postes. Le commandant en chef a.i, Léon Charles qui a ordonné l’opération est non seulement toujours en poste, mais il n’a même pas été convoqué par l’IGPNH pour son rôle dans la tragédie du 12 mars à Village de Dieu.

Le coordonnateur, le superviseur, le commandant de l’opération, et les opérateurs du drone de la police ne font l’objet d’aucune enquête administrative ni mesure conservatoire. Au contraire, les operateurs du drone de la PNH ont déjà quitté le pays, avec le soutien de Léon Charles, selon le RNDDH.

Quant aux parents des policiers victimes, leurs proches continuent d’attendre leurs corps pour organiser leurs funérailles.

En dépit des promesses formelles de Jovenel Moïse, de Joseph Jouthe et de Léon Charles pour récupérer les cadavres des policiers qui ont péri à Village de Dieu le 12 mars dernier, rien n’a toujours été fait en ce sens. Cependant, la PNH a négocié et obtenu la restitution d’un véhicule blindé confisqué par les bandits. Ce qui fait dire aux parents des policiers que le blindé de la PNH était plus important que la vie des victimes.

A part les restes des policiers, la PNH doit aussi récupérer d’autres équipements, du matériel et des armes de gros calibre dont un fusil M-60, qui sont encore aux mains des bandits du Village de Dieu. La possession de telles armes est particulièrement dangereuse pour la sécurité de la population qui est livrée à elle-même. Pire encore, deux semaines, on dirait que le dossier de Village de Dieu n’est plus à l’ordre du jour. La récupération des cadavres des policiers massacrés dans ce quartier tenu par des alliés du pouvoir en place ne serait pas une priorité.

Si deux semaines après Léon Charles n’est toujours en mesure de récupérer les corps des policiers victimes du drame de Village de Dieu, il est, cependant, très actif sur un autre terrain.

Depuis le décès, apparemment par balle du policier Mystal Pierre-Richard à l’angle de Delmas 31 et l’autoroute de Delmas, le lundi 22 mars dernier dans des circonstances jusqu’ici non élucidées, sans aucune enquête préalable de l’IGPNH, Léon Charles s’est mis à distribuer des mandats d’amener à l’encontre de policiers syndiqués membres du SPNH-17 dont le coordonnateur dudit syndicat, Jean Elder Lundi, après les avoir révoqués.

Dans une note rendue publique sur sa page Facebook le mardi 23 mars 2021, la PNH qui ne fait aucune différence entre ‘’Fantom 509’’ et le SPNH-17, informe que ‘’Ces individus armés et dangereux membres du groupe ‘’terroriste Fantom 509’’ sont activement recherchés par la police nationale pour crimes, assassinats, destructions de biens publics et privés entre autres.’’

L’autorité de Léon Charles est de plus en plus contestée. Certains cadres supérieurs et intermédiaires l’accusent de politiser la police nationale et d’y introduire une entité dénommée ‘’All Black’’ qui serait un escadron de la mort chargé d’exécuter de sales besognes sous couvert de l’institution policière.

Déstabilisée, divisée et politisée, l’absence de leadership au sein de la PNH fait craindre pour son avenir, notamment dans un contexte de crise politique où un seul homme dont le mandat a expiré depuis le 7 février dernier, concentre entre ses mains, tous les pouvoirs (exécutif, judiciaire et législatif) et continue de s’accrocher au pouvoir, en dépit d’une vaste contestation populaire.